“J'aime juste créer et cela peut prendre tout un tas de formes différentes.”
Artiste, photographe, amoureuse de la nature et de la cuisine, Melancholya est notre invitée d’aujourd’hui et elle nous parle de son univers créatif et envoûtant. Découvrez son travail sur son site, son compte Instagram, ainsi que sa nouvelle boutique !
Tout d’abord, est-ce que tu pourrais nous dire qui tu es ?
Je suis Melancholya, photographe culinaire également créatrice de tout un tas de petites choses (illustrations, objets de papèterie, etc...).
Je suis notamment l'auteur du blog "La Faim Est Proche" par le biais duquel je mets à l'honneur l'art culinaire à travers un univers fictif à l'ambiance ancienne, champêtre, parfois gothique et en clair-obscur. J'aime être libre d'explorer l'art et l'artisanat et de pratiquer toutes les activités qui me font envie. J'aime juste créer et cela peut prendre tout un tas de formes différentes.
Dans une même image, chacun peut y voir quelque chose de différent qui lui est propre.
©️ Melancholya
Quelle est ta relation avec la photographie et le culinaire ? Comment les deux se sont rencontrés dans tes créations ?
Je fais de la photo depuis plus de 15 ans. C'est ma passion numéro une qui m'a fait mettre les deux pieds dans le domaine artistique.
En 2015, pendant une période de chômage qui a suivi la fin de mes études, je me suis mise à cuisiner. J'aimais beaucoup ça auparavant mais n'avait pas forcément le temps de bien m'y consacrer. A ce moment-là, j'étais également en manque d'inspiration sur le plan photo. Je voulais photographier, mais ne trouvais pas de projet qui m'emballait vraiment. Et puis, en parcourant tout un tas de blogs culinaires, j'ai eu envie de créer le mien.
Et c'est ainsi que "La Faim Est Proche" est né et que ces deux pratiques se sont rencontrées dans ma vie.
Je n'ai alors plus quitté ce domaine-là qui, je trouve, est une source d'inspiration infinie tant il est possible de créer des ambiances différentes. De mon point de vue, la cuisine touche tout le monde et accompagne nos vies au quotidien. C'est à la fois un besoin mais également un plaisir.
La photo, quant à elle, est le média parfait pour créer tout l'univers qui peut accompagner chaque recette et toucher les gens en profondeur. Dans une même image, chacun peut y voir quelque chose de différent qui lui est propre. Lui rappeler un souvenir, une personne, des rencontres, ou simplement, donner l'envie de s'évader et de cuisiner. Et cela me touche particulièrement.
D’où tires-tu ton inspiration pour tes tableaux ? Quels sont les artistes et photographes qui t’attirent le plus ?
Mes inspirations sont vraiment très variées et j'adore m'inspirer. La peinture classique est une réelle source d'inspiration pour moi. J'admire Le Caravage, Vermeer ou bien encore Rembrandt pour leur traitement de la lumière. Le clair-obscur est vraiment une lumière qui m'attire beaucoup pour les ambiances sombres et intimistes qu'il permet de donner aux images.
Au niveau des thématiques picturales, ce sont vraiment la scène de genre et la nature morte qui m'intéressent le plus. Je suis également très inspirée par l'imaginaire gothique et par les ambiances champêtres. Ces deux ambiances peuvent sembler s'opposer mais j'aime les assembler pour créer l'univers de "La Faim Est Proche".
Je m'intéresse également beaucoup au mode de vie du XVII au XIXe siècle. La simple vue d'objets anciens ou de costumes me donnent souvent beaucoup d'idées de créations. La littérature, notamment la littérature anglaise du XIXe siècle (Les soeurs Brontë, Jane Austen, Mary Schelley...) m'inspire beaucoup, ainsi que le cinéma et les séries qui sont, sur les plans visuels et esthétiques, de vraies mine d'or aussi bien pour la création des décors que pour le traitement de la lumière. Mes derniers coups de cœur en date : Anne with an E, Penny Dreadful, Les filles du docteur March, ou bien encore La Famille Addams.
Je suis également très marquée depuis mon enfance par l'univers de Tim Burton que j'admire énormément et qui m'inspire toujours autant.
La nature est également très importante dans mon art car elle me touche beaucoup par bien des aspects. Ses textures, ses couleurs, ses lumières, ses paysages... Elle est pour moi à la fois apaisante et inspirante.
La littérature, notamment la littérature anglaise du XIXe siècle (Brontë, Austen, Schelley) m'inspire beaucoup, ainsi que le cinéma et les séries qui sont, sur les plans visuels et esthétiques, de vraies mine d'or.
©️ Melancholya
J'aime flâner en forêt, observer les saisons, prendre conscience du temps qui passe, de chaque instant de la journée. J'aime également beaucoup me promener dans des villages de campagne aux bâtisses anciennes. Cela me plonge tout de suite dans une ambiance bien particulière que je cherche à retranscrire dans mes images.
Les brocantes ou Emmaüs sont également des endroits où je passe du temps pour trouver quelques inspirations.
Enfin, la photographie et l'illustration sont également très riches en inspiration. J'admire le travail de Linda Lomelino, Eva Kosma Flores et Valentina Solfrini pour ce qui est du domaine culinaire. Mais les artistes tels que Gemmy Woud-Binnendijk, Le Turk, Sacha Goldberger, Natalia Drepina, Arthur Rackham, Benjamin Lacombe, Gustave Dorée, Edmund Dulac ou bien encore Laura H. Rubin me fascinent beaucoup. Et il y en a tant d'autres...
Tu cumules plusieurs passions et occupations, comment tu partages ton temps entre chacune ? Est-ce qu’il y a une d’entre elles qui prédomine ?
L'équilibre se crée tout seul sur la durée. Aucune semaine, aucun mois ne ressemble vraiment au précédent. Et c'est vraiment ce qui me plaît dans mon métier.
©️ Melancholya
Effectivement, il y a beaucoup de domaines qui m'intéressent et je ne parviens pas à me cantonner à une seule pratique. Je suis une touche-à-tout et il m'est souvent bien difficile de réussir à équilibrer tout cela.
Actuellement, la photographie et la cuisine prédominent car j'ai basé mon activité sur ces pratiques, pour le moment du moins. Mais j'essaie également de prendre du temps pour dessiner car c'est une pratique que je souhaite vraiment intégrer de plus en plus dans mes créations futures. Je fais également beaucoup de vidéo dans le but de vulgariser le domaine artistique et de partager mes retours d'expérience.
Je fonctionne beaucoup par "phases". Mon rythme est cyclique et mes activités vont dépendre des projets sur lesquels je vais me mettre à travailler. Je fonctionne à l'envie. Par exemple, en ce moment, je travaille sur la création d'un nouveau photo-montage et pour cela j'ai besoin de créer des maquettes.
Alors en ce moment, je crée des maquettes. Mais il y a de fortes chances pour que je laisse ensuite cela de côté pendant quelques mois pour me consacrer à autre chose. Quelque chose que je n'ai pas fait depuis un certain temps et que j'ai besoin de pratiquer à nouveau. Je ne parviens pas à travailler autrement car je m'ennuie très vite et que j'ai besoin d'être stimuler par la nouveauté et la diversité. J'ai également besoin de me sentir très libre dans mes pratiques. C'est un fonctionnement très intuitif pour moi mais qui est parfois très difficile à dompter. J'apprends petit à petit à faire avec. L'équilibre se crée tout seul sur la durée et aucune semaine, aucun mois ne ressemble vraiment au précédent. Et c'est vraiment ce qui me plaît dans mon métier.
Dans tes images, le travail de mise en scène est incroyable, quelles sont tes techniques de composition préférées ou que tu incorpores le plus souvent ?
Tout d'abord, je prête attention aux différentes couleurs qui vont composer mon image. Ma règle : pas plus de 3 teintes de couleur différentes dans une même image. Sinon, cela devient très difficile à travailler. J'essaie également d'équilibrer les "pleins" et les "vides" en essayant de laisser une partie de l'image dégagée afin de la laisser respirer. J'essaie aussi de créer des lignes. Le but est que toutes ces choses attirent le regard du spectateur sur le sujet principal de mon image. Enfin, pour que l'image touche les gens, j'essaie de lui faire raconter une petite histoire. Cela la rend plus vivante et plus réaliste, même si l'histoire racontée est des plus basiques. C'est l'âme même d'une image.
Travailles-tu qu’en lumière naturelle ?
Absolument. Je travaille uniquement en lumière naturelle et quasiment toujours sans réflecteur. Cela me permet d'obtenir des clair-obscur comme je les aime. C'est une lumière très intéressante à travailler et très économique. Mais elle est parfois capricieuse. Il faut s'avoir s'adapter à chaque situation et organiser ses moments de shoot en fonction des moments de la journée, de son environnement de travail, etc.
Je trouve que tu es très douée en retouche et édition, as-tu des astuces à partager afin de sublimer la couleur via la retouche ?
Effectivement, j'accorde une grande place à la post-production de mes images. Cela fait partie intégrante de mon processus de création et j'adore utiliser Photoshop. C'est pour moi un outil incroyable. Difficile de donner quelques astuces sans entrer dans des détails techniques pour ce genre de chose. Mais vraiment, je pense qu'il est important d'utiliser chaque outil avec parcimonie. Le piège avec la retouche, c'est vraiment de se laisser emporter et de partir dans des excès.
A mon sens, la retouche est un peu comme du maquillage : je vais travailler plein de petites choses, de façon plus ou moins subtile pour qu'au final, le spectateur ne se dise pas au premier coup d'œil que l'image est ultra retouchée.
J'essaie aujourd'hui d'avoir une relation différente au temps et d'accepter mon rythme. Même si cela veut dire de n’avoir rien à montrer pendant quelque temps.
©️ Melancholya
Cette dernière doit rester réaliste et équilibrée. Et c'est là toute la difficulté. En ce qui concerne la couleur, je fais attention de ne pas trop saturer mes couleurs et de les faire correspondre les unes avec les autres. Pour cela, je fais beaucoup de petites retouches localisées avec le pinceau dans Camera Raw (ou Lightroom) et en utilisant les masques de fusion dans Photoshop. Cela me permet ainsi d'aller dans le détail et de créer une image plus équilibrée.
Parmi les différentes collaborations que tu as déjà réalisées, lesquelles t’ont le plus marquée et pourquoi ?
Fin 2019, j'ai réalisé une exposition de photographies culinaires pour une médiathèque. Le thème était Noël. La création d'expositions est vraiment quelque chose que j'aime beaucoup faire et qui donne du sens à mon travail. Dans cette prestation, le client m'a vraiment laissé libre de créer ce que je voulais comme je le voulais. J'apprécie beaucoup ce climat de confiance et cette totale liberté de création. Je n'ai pas encore eu beaucoup de prestations dans le cadre de mon activité, mais toutes celles que j'ai eues jusqu'à présent ce sont déroulées de cette manière-là. Et vraiment, ce n'est que du bonheur.
Que signifie ton nom d’artiste et pourquoi l’as-tu choisi ?
Melancholya fait écho à beaucoup de choses en moi. Tout d'abord, ce nom possède la même racine étymologique que mon prénom qui est Mélanie. En grec, "Melanos" signifie "sombre, noir". De plus, Melancholya fait référence à la mélancolie. Et la mélancolie est quelque chose qui me suis depuis que je suis petite. Aujourd'hui, c'est quelque chose qui me touche et m'intrigue beaucoup, que j'essaie de comprendre et d'explorer. J'aime le sombre. Et bien que coloré, mon art reste sombre. Mon projet artistique "La Faim Est Proche" est empreint de mélancolie. Ce n'est pas quelque chose que j'ai décidé, cela s'est imposé. C'est comme une thérapie personnelle. A travers cet univers, j'explore les états d'âmes de mes personnages et souvent, ils sont confrontés à leur mélancolie. Ils vivent avec et essaie de la dépasser. La mélancolie m'inspire beaucoup car elle nous rend vulnérable, fragile et fait tomber les masques. Et au final, ce nom d'artiste fait le lien entre toutes mes créations et la personne que je suis.
Les artistes ont souvent du mal à réellement aimer leurs propres créations, est-ce que c’est ton cas ?
Oh la la oui ! Il est souvent difficile de s'affirmer en tant qu'artiste. J'ai très peu confiance en moi et j'ai tendance à toujours me comparer aux autres.
Alors forcément, je rencontre souvent des périodes de crises où je me sens bien en-dessous de ce que j'aimerai être. Il y a tant d'artistes et de créations que j'admirent, il y a tant de choses que j'aimerais faire que souvent, j'ai des petits moments de découragement et de rabaissement de moi-même et de mon art. Aujourd'hui, nous avons accès à tellement de ressources, d'informations et d'images, et tellement de gens créent des choses extraordinaires qu'il est difficile de ne pas se comparer.
Le plus souvent, je ne suis pas très satisfaite de ce que je fais sur le moment et c'est en général avec un peu de recul que je reconnais le potentiel. Soit dit en passant, la comparaison et l'admiration d'autres artistes peut me stimuler et me pousser à m'améliorer.
A mon sens, la retouche est un peu comme du maquillage : je vais travailler plein de petites choses, de façon plus ou moins subtile pour qu'au final, le spectateur ne se dise pas au premier coup d'œil que l'image est ultra retouchée.
©️ Melancholya
Mais j'ai compris récemment que tout était une question de perception du temps et de point de vue. J'essaie aujourd'hui d'avoir une relation différente au temps et d'accepter mon rythme. De prendre le temps de faire chaque chose comme je le souhaite, même si je ne vais avoir rien à montrer pendant quelque temps. La concurrence est tellement rude aujourd'hui, qu'on a souvent peur de se faire oublier. Dans mon cas, j'ai compris que le plus souvent, quand je n'aime vraiment pas mon travail, c'est parce que je me suis forcée à produire rapidement quelque chose juste pour avoir toujours quelque chose à montrer sur mes réseaux sociaux. Et cela n'est pas une bonne façon de créer dans mon cas. Car je perds le sens de ce que je fais. Alors désormais, j'essaie juste d'accepter mon rythme et de me focaliser sur ce qui est vraiment important pour moi. Et c'est déjà un grand pas.
Et enfin, quel est ton plat préféré de la cuisine française ? Est-ce qu’il ferait un bon sujet de shooting ?
Il y a tellement de choix possibles dans la cuisine française !!!
Difficile de choisir. Mais si je ne devais en retenir qu'un, je dirais les lasagnes de ma maman à la chair à saucisse. Pas hyper facile à mettre en scène et à photographier. J'attendrais probablement le lendemain pour les photographier, car elles se tiendraient mieux à la découpe et dans les assiettes. Il serait ainsi plus facile de photographier les couches sans que tout s'étale dans l'assiette.
Merci infiniment pour ce partage !